Le Canard Enchaîné révèle que l’Inspection générale des finances a remis un document à Bruno Le Maire, en février 2021, suggérant de baisser de 60% le prix des péages sur les deux tiers du réseau autoroutier.
Mais bien sûr, alors que les tarifs augmentent encore une fois de 4,75% le 1er février, cette idée semble être tombée dans l’oubli. Les sociétés concessionnaires d’autoroutes ont une rentabilité « très supérieure à l’attendu », selon le rapport de l’IGF, dépassant largement la cible de 7,67% établie lors de la privatisation des autoroutes en 2006. Les concessions APRR-Area et ASF-Escota auraient même une rentabilité proche de 12%. Mais pourquoi s’inquiéter pour quelques pourcentages de plus ou de moins quand on peut continuer à soutirer des millions d’euros aux automobilistes? Apparemment, le ministre de l’Économie préfère garder cette information pour lui et continuer à laisser les sociétés d’autoroutes faire des « surprofits » .
Attention, en tant que libéral, je ne suis pas contre les profits. Je pense même qu’une entreprise doit faire les profits les plus importants possibles. Mais ici, nous sommes dans une concession de services publiques et dans un monopole. C’est très différent d’un fonctionnement de marché classique.
Les mesures proposées par l’IGF
« Il est temps de dire adieu aux sociétés d’autoroutes qui nous font payer des tarifs exorbitants pour rouler sur leurs routes ». C’est en tout cas ce que pense l’IGF, l’organisme chargé de surveiller la gestion des finances publiques, qui s’étonne que le gouvernement se fiche éperdument des revenus dégagés par ces sociétés, malgré les 11 milliards d’euros qu’elles gagnent chaque année grâce aux péages. Selon l’IGF, il est temps que le ministère de l’Économie et des Finances s’implique davantage dans les négociations relatives aux concessions.
Pour remettre les sociétés d’autoroutes à leur place, l’IGF a proposé trois mesures:
- La première, qui consiste à baisser les tarifs de péage de 60% dès 2022, est déjà oubliée.
- La deuxième, qui consiste à mettre fin aux concessions dix ans plus tôt que prévu, est légalement envisageable.
- La dernière, qui consiste à ponctionner 63% des bénéfices des sociétés qui ont réalisé des « surprofits », est tout simplement impossible.
Il est étonnant de voir que, quatre ans après les manifestations des « gilets jaunes », le coût des péages autoroutiers reste un sujet brûlant. Les manifestants dénonçaient déjà l’envolée des tarifs à l’époque, et certains en sont même venus aux mains avec les péages. Depuis, des rapports du Sénat et de la Cour des Comptes ont souligné que l’État aurait pu mieux valoriser ce patrimoine de la Nation et que les négociations avec les sociétés concessionnaires étaient souvent en faveur de ces dernières. Malheureusement, il semble que le sujet ne sera jamais réglé et que nous continuerons à payer des tarifs exorbitants pour rouler sur les autoroutes.
Mais le Gouvernement ne veut rien voir
C’est incroyable de voir à quel point le ministre Bruno La Maire est prêt à fermer les yeux sur la surrentabilité des concessions autoroutières. Pourtant, même à Bercy ils admettent qu’il y a des sociétés qui dépassent largement la cible des 7,67%. Mais qu’importe, ces messieurs du gouvernement trouvent que les mesures proposées par l’IGF sont complètement inapplicables. Comme si ça les dérangeait vraiment!
Et puis ils préviennent qu’ils seront intraitable lors des prochaines négociations, comme si c’était une menace.
Oh, mais attendez, c’est le ministre lui-même qui a commandé ce rapport à l’IGF. Quel courage, vraiment! On se demande pourquoi il a commandé ce rapport s’il n’a pas l’intention de s’en servir.
Les peages autoroutiers, c’est comme les impôts, on paie toujours plus cher pour arriver à la même destination.
