PIERRE JOSEPH PROUDHON, PÈRE DE L’ANARCHISME FRANÇAIS

A l’heure où l’économie mondiale se cherche, j’ai décidé de vous présenter Pierre Joseph Proudhon, l’enfant terrible du socialisme français. Peu connu et peu étudié, il n’a pourtant pas manqué de défrayer régulièrement la chronique durant le XIXème siècle.

Révolté par le capitalisme, farouchement opposé au communisme, durant toute son existence, de 1806 à 1865, ce bisontin n’a eu de cesse de s’opposer à tous les pouvoir.

Peu doué en affaire, cet homme à l’ego quelque peu surdimensionné a publié une soixantaine d’ouvrages entre thèses économiques et théories philosophiques. Il a côtoyé Karl Marx et il a été élu député en même temps que Louis Napoléon Bonaparte, Victor Hugo et Pierre Leroux.


Qui était Pierre Joseph Proudhon ?


De son enfance et de sa jeunesse où il aura du lutter pour survivre et suppléer aux besoins les plus élémentaires de ses parents en déroute financière, Pierre Joseph Proudhon conservera une sorte de frustration. Une frustration qu’il fera porter aux patrons qui exploitent le travail des ouvriers; une frustration vis à vis des rentiers qui font fortune sur le dos des plus faibles et de l’État qu’il fustige à la première occasion.

Il sera frustré aussi en raison des études aux quelles, par manque de moyens, il n’aura pas accès. Il ne passe son BAC qu’à 29 ans et uniquement pour obtenir une bourse d’étude.

La propriété c’est le vol

Proudhon souhaitait que chaque français puisse avoir accès à la propriété.

Sa phrase la plus retentissante reste « la propriété c’est le vol ». En sortant cette exclamation de son contexte, les propos et la pensée de Proudhon ont souvent été dévoyés alors qu’il n’avait rien contre la propriété privée en elle même. Au contraire, il souhaitait même que chaque français puisse avoir accès à la propriété, sans, en revanche, ne jamais pouvoir la transmettre. Pour Proudhon, chacun doit pourvoir conserver l’usufruit de son bien, issu uniquement de son travail, et ce, jusqu’à sa mort. Il supprime la notion d’héritage matériel de manière à ce que personne ne puisse posséder ni les biens ni la vie d’autrui.

S’il fut un temps proche de Karl Marx, ce dernier finira par le qualifier de « petit bourgeois ». Touche à tout, Proudhon sera tour à tour typographe, patron d’imprimerie, journaliste, avocat d’affaire, député…et surtout il aura cumulé de nombreuses années de prison en raison de ses engagements politiques mais aussi de ses banqueroutes successives.

Pierre Joseph Poudhon, le père de l’anarchisme

Proudhon fustige toutes les formes de pouvoir

Proudhon rêve donc de réinventer une société française, plus juste, plus équitable où la valeur travail serait érigée au dessus de toutes les autres valeurs, y compris au dessus de celle de la religion catholique qu’il fustige aussi. En fait, Proudhon fustige toutes les formes de pouvoir, que ce soit le pouvoir politique, le pouvoir religieux et même le pouvoir judiciaire.

Ses nombreux écrits, mais aussi ses actes de « bravoure » ont emmené ses contemporains à le considérer comme le père de l’anarchisme. Il proclame une autogestion des individus qu’il théorise aussi au niveau industriel avec la création de coopératives gérées par les adhérents eux-mêmes. Très proche de Mikhaïl Bakounine, Proudhon considère l’anarchisme comme la seule forme de démocratie constitutionnelle viable à court, moyen et long terme.

Le mutuellisme et le fédéralisme

Proudhon souhaite la mise en place d’échanges mutuels plus respectueux des investissements du prêteur et de l’emprunteur

De son esprit fertile et agile sont nés le mutuellisme et le fédéralisme.
Pour ce qui est du mutuellisme, il souhaite l’instauration de règles économiques basées sur la quantité de travail nécessaires à la production d’un bien X dans un soucis permanent d’égalité. Comme son nom l’indique, en créant le mutellisme libertaire il souhaite la mise en place d’échanges mutuels plus respectueux des investissements du prêteur et de l’emprunteur. En 1848 la France comptera d’ailleurs quelques 2 000 caisses de secours mutuel. Confiance et solidarité sont d’ailleurs les mots d’ordre de Proudhon.

Il crée des caisses de crédit mutuel dont il ne voit le rôle que comme des prêts sans taux d’usure applicable aux emprunteurs. Les seuls intérêts réclamés, de l’ordre de 0,2 à 0,3% ne couvrant que les frais administratifs. Seule une hypothèque ou une caution viennent garantir le remboursement des sommes empruntées.

Proudhon va même jusqu’à créer La Banque du Peuple, qui n’est rien d’autre qu’une bourse d’échange de produits et de services fournissant outils et crédits en échange de travail. Une expérience somme toute assez louable mais qui eut tôt fait de plonger littéralement.

En clair Pierre Joseph Proudhon croit que l’homme est bon par nature et que c’est la société qui le pervertit. C’est en cela qu’on le rapproche régulièrement de la pensée de Rousseau.

Adepte du grand Soir, Proudhon comptait, pour appliquer ses théories de socialisme libéral sur une révolte ou plutôt une révolution violente et soudaine de la part de la classe ouvrière et même de la classe paysanne.

Si, comme nous l’avons vu en introduction, Pierre Joseph Proudhon n’est plus enseigné ou que très peu, certaines de ses idées sont tout de même passées à la postérité. C’est en effet lui qui a posé les bases des systèmes mutualiste qui régissent aujourd’hui les caisses d’assurance complémentaires, et les autres mutuelles aux quelles nous avons régulièrement recours.

Le fédéralisme selon Proudhon

Aux grands mutuellistes érigés par Proudhon, il faut ajouter les notions de fédéralisme ouvrier naissant. Après avoir publié en 1863 « Du Principe fédératif et de la nécessité de reconstituer le Parti de la Révolution« , il rédige l’année suivante « De la Capacité politique des classes ouvrières, véritable manuel de sa politique fédéraliste« .

Proudhon y prône l’abstention parlementariste et incite la classe ouvrière à demeurer loin de toute forme de pouvoir, y compris de se présenter à quelques élections que ce soit afin de ne pas tomber dans les carcans des institutions bourgeoises. Il enclin le prolétariat à se fédérer en tissus associatif. Ce sont les bases d’un syndicalisme polémiste.

Il fustige aussi l’école gratuite qu’il considère comme régentée par l’État qui souhaite en faire sortir des clients et des encyclopédistes et non des citoyens libres et maîtres d’eux-mêmes.

Anti clérical et antisémite notoire

Proudhon est antisémite

Proudhon, qui rejette toutes les formes de pouvoir et tous les systèmes hiérarchiques, ne peut adhérer au dogme posé par l’Église catholique. Il écrit d’ailleurs en 1858 dans « De la justice dans la Révolution et dans l’Église« , « S’il est un être qui, avant nous et plus que nous, ait mérité l’enfer, il faut bien que je le nomme : c’est Dieu ».

Nombre de juifs étant banquiers ou à la tête d’industries florissantes, Proudhon fait des amalgames qui l’amènent à penser que les juifs sont à l’initiative du capitalisme naissant. Il les taxe d’être une « race insolente, obstinée, infernale » et « Premiers auteurs de cette superstition malfaisante, appelée catholicisme… » dans ses Carnets, 20 février 1847.

Proudhon le misogyne

En plus de ses relans racistes, anticléricaux et antisémites, Proudhon ne perd jamais une seule occasion de placer la condition féminine en dessous de la condition masculine. Il n’a eu de cesse de critiquer la liberté des femmes, considérant ces dernières comme étant incapables de « produire des idées », affirmant même qu’elles « n’accéderaient jamais au verbe que la médiation de l’homme ».

Dans les colonnes de son journal Le Peuple, il s’oppose virulament aux femmes qui, à l’instar de Jeanne Deroin, se présentent aux élections législatives. On prêtera même à Proudhon ces propos tenus dans Le Peuple du 12 avril 1849 :  «L’égalité politique des deux sexes, c’est-à-dire l’assimilation de la femme à l’homme dans les fonctions publiques est un des sophismes que repousse non point seulement la logique mais encore la conscience humaine et la nature des choses […] La famille est la seule personnalité que le droit politique reconnaisse […] Le ménage et la famille, voilà le sanctuaire de la femme ».

Cette misogynie clairement affichée ne lui vaudra pas que les foudres de la gente féminine mais aussi celles de nombreux démocrates à l’instar de Joseph Déjacque ou de Pierre Leroux.

Les livres de Proudhon

Du Principe fédératif et de la nécessité de reconstituer le Parti de la Révolution: https://amzn.to/2Nu21Vc

De la Capacité politique des classes ouvrières, véritable manuel de sa politique fédéraliste: https://amzn.to/2PZX08w

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